C. Dolbeau
A partir du milieu du XIIIe
siècle, la
Sorbonne devient un pôle
d'attraction
culturel et religieux auquel les jeunes
clercs croates (dominicains et
franciscains) ne restent pas
indifférents. Les archives de la
vénérable université
révèlent, en effet,
que beaucoup d'entre eux viennent y faire
leurs études ou y parfaire leurs
connaissances (40).
Parmi les plus connus,
citons Augustin Kazotiæ (futur
évêque de
Zagreb et adversaire de Charles-Robert
d'Anjou, béatifié en 1702),
Paulus
Nicolaï de Sclavonia (qui se
querelle
pendant dix ans avec l'administration de
son collège), Iohannis de Ragusio
ou Ivan
Stojkoviæ (futur cardinal, adversaire des
Hussites et disciple de Gerson, partisan
de l'antipape Félix V, auteur d'un
"Tractatus de Ecclesia"), Miho
Dubrovcanin (Michel de Raguse), Juraj
Dragisiæ (futur archevêque,
défenseur de
Pic de la Mirandole et de Savonarole)
(41),
Ludovik Crijeviæ Tubero (auteur des
"Commentaria suorum temporum"), Petar
Gucetiæ Dragojeviæ (futur
évêque de
Ston, surnommé "doctor
illyricus"),
Bonifacije de Stefanis Drkolica,
Tranquillus Andronicus de Dalmatia,
Michael Georgü de Traguario, Marcus et
Benedictus de Syremio, Cosmas
Symonis, etc. Certains y restent
même
pour professer, comme Benko Benkoviæ
("monarcha scientiarum"), Marijan
Bondenaliæ ou Georges d'Esclavonie
(42). En
dehors de ces étudiants et de ces
professeurs qui ont probablement
contribué à diffuser la
culture française
dans leur pays, l'histoire retient
également les noms de
l'archevêque Ilija
Saraciæ qui avait vécu en
Avignon; s'y
était lié avec Benoît
XII (Jacques
Fournier) et parlait le provençal,
et
celui du médecin français
Garamond qui
exerçait à Raguse (1322-
25). D'autre
part, cette période angevine
(1308-1382)
voit se développer une certaine
forme de
francophonie en Croatie : "On retiendra,
écrit Branko Franoliæ
(43), qu'une
sorte
de langue hybride, appelée "lingua
francogallica" ou "gallica" tout court a
été parlée par un
des quatre groupes
linguistiques et ethniques dont se
composait à cette époque la
population de
Zagreb".
En dépit de l'attrait de Paris
pour les
intellectuels croates, c'est tout de
même
l'influence italienne qui règne en
maître
de l'autre côté de
l'Adriatique. C'est
tout d'abord la vogue des "laudi" et des
oraisons, celle des traductions
adaptées
de la "Legenda Aurea" de Jacques de
Voragine ou des traités moraux
comme le
"Fiore di Virtù" de Tommaso
Gozzadini.
Petit à petit, toutefois, la geste
française arrive en Croatie. "Les
croates, remarque Deanoviæ
(44), ont
connu d'assez bonne heure les chansons de
geste et les romans antique ou courtois
de la littérature française
médiévale,
pour les adapter dans leur propre
langue".
40. Cf. Les Croates et
l'université de
Paris au Moyen-Age, André
Tuillier, in
Annales de l'lnstitut Français de
Zagreh, 1988, pp. 109-147 ; Un conflit
entre un étudiant croate et
l'université de Paris au XVe
siècle, A.
Tuillier, in Mélanges de la
hihliothèque
de la Sorhonne, vol. 7, pp. 37-104 ; Les
Croates et les milieux intellectuelr
parisiens aux XIVe et
XVes siècles, A.
Tuillier, in Croatica Christiana
Perindica, Zagreb 1988.
41. Juraj Dragisiæ (Gregorius Benignus de
Salviatis) a laissé une oeuvre
importante
dont les principaux titres sont les
suivants : Logica nova secundum mentem
Scoti et b. Tomae Aquinatis aliorumque
(1480), Volumen de dialectica nova
(1489), De natura coelestium spiritum
guos angelos vocant (1499) et Artis
dialecticae praecepta vetera ac nova
(1520).
42. Appelé parfois Georges de Rain,
Georges d'Esclavonie vint étudier
à Paris
à la fin du XIVe siècle ;
retiré à
Auxerre puis à Tours où il
fut chanoine
de la cathédrale, il est l'auteur
du
Château de la Virginité
(imprimé dès
1505), d'un résumé de la
Somme
Théologique de Saint Thomas
d'Aquin, et
de diverses exhortations pieuses. Ses
manuscrits sont conservés à
Tours. Cf. A.
Tuillier, op. cité, et Louis
Léger,
Georges d'Esclavonie, chanoine
pénitencier de la
cathédrale de Tours, in
Revue des Bibliothèques, no 19 (1909),
pp. 145-152.
43. B. Franoliæ, op. cité, p. VIII.
44. Les influences italiennes sur
l'ancienne littérature yougoslave
du littoral adriatique, in Revue de
Littérature Comparée 1934,
p. 30.
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