Declaration du Cardinal Seper (faite à Radio-Vatican le 9 février 1981)
A l'occasion du XXIe anniversaire de la mort du Cardinal Stepinac nous sommes vraiment peinés par la déclaration faite récemment par un fonctionnaire haut placé du Parti communiste et du régime yougoslave, déclaration qui a été publiée par la presse et par la radio. Je ne veux pas entrer ici dans les détails de cette déclaration selon laquelle on se moque de Mgr Kuharic qui, selon eux, prétend être "un alter ego du Cardinal Stepinac". La visite pastorale de Mgr Kuharic, effectuée récemment en Australie auprès des catholiques croates, a été présentée par ces politiciens en des termes offensant les fidèles. Je rappelle aussi que ma personne a été aussi attaquée dans cette fameuse déclaration où l'on prend pour un crime le fait que j'ai parlé à un prêtre de mon diocèse qui est émigré. On voudrait que le Vatican prenne des mesures à mon encontre pour garder les bonnes relations avec mon pays. Cette déclaration est centrée sur le Cardinal Stepinac qu'on considère comme un personnage politique de premier rang, même comme le metteur en scène de la création de l'Etat croate indépendant en accord avec les occupants. En réalité Mgr Blazevic, en ce temps-là procureur d'Etat et actuellement Président du Praesidium de Croatie, et l'Archevêque Stepinac se sont trouvés, dans un moment historique, face à face mais pas dans le même rôle: l'un était accusateur et l'autre accusé. On ne peut rien dire contre quelqu'un qui essaie de se défendre et de justifier ses actions passées, mais tout devait être fondé sur la vérité et sur les faits mais non sur quelques échafaudages. Malheureusement ce n'est pas le cas ici. Nous pouvons dire sans nous tromper que les faits sont contraires à l'accusateur et en faveur de l'accusé. La figure du Cardinal Stepinac qui est donnée par M. Blazevic est historiquement fausse. Pendant mes études à l'Université. de Rome, j'ai vécu sept ans comme collègue du Cardinal Stepinac. Ensuite pendant sept années je fus son secrétaire personnel et son homme de confiance; enfin le Saint-Siège m'a désigné comme son successeur. C'est pourquoi personne, je pense, n'a eu occasion de mieux connaître son caractère sa mentalité, et de mieux suivre de près sa vie et son travail. Je dois reconnaître que Stepinac était tout à fait à l'opposé du portrait que Blazevic nous fait. Oui, Stepinac était un grand patriote, il aimait son peuple au point de s'identifier avec lui, car il considérait que c'était son devoir moral. Mais il n'était jamais politicien et encore moins un politicien de parti. Si Stepinac a pris une attitude ferme contre le communisme nous ne devons pas oublier qu'il visait l'idéologie matérialiste et athée, mais il avait sous les yeux une image concrète du communisme: le stalinisme depuis longtemps rejeté et condamné par le monde entier, et même par l'URSS. Ces graves accusations contre Stepinac, surtout l'affirmation de son rôle politique et ses liens avec les Oustachis, il faudrait les démontrer par les documents, ce que, jusqu'à présent personne n'a fait et n'a pu faire car, comme nous l'avons déjà dit, a les faits prouvent le contraire".
J'espère que le temps viendra où le procès contre le Cardinal Stepinac pourra être révisé sans préjugés et sans passion. Il ne faut pas oublier que la parole ne fut pas donnée aux nombreux témoins qui voulaient déposer en sa faveur, soi-disant parce que leur témoignage n'aurait pas été probant.
Parmi ces témoins qui attendaient en vain dans l'antichambre du tribunal, je me trouvais moi aussi. Bien que nous sachions que dans nos écoles et nos livres scolaires, le Cardinal Stepinac est présenté comme un criminel de guerre et un ennemi de l'Etat, j'ai beaucoup de peine en constatant que de si graves accusations émanent de personnages haut placés et que ceux-ci ne contribuent pas aux efforts faits pour calmer les esprits, ce dont nous aurions grand besoin en ce moment.
Gloire au Cardinal Stepinac.
L'allocution de Mgr Franjo Kuharic le 10 février 1981 à l'occasion du 21e anniversaire de la mort du cardinal ALOJZIJE STEPINAC
"In te, Domine, speravi!" (Ps 31,1)
"Et je prendrai le droit comme mesure et la justice comme niveau."
(Is 28,17)
Mes chers frères et soeurs,
1. Nous venons d'entendre le Sermon sur la montagne. Par ce sermon la bouche de Dieu a annoncé l'esprit du royaume de Dieu et tracé les principes de l'histoire nouvelle. Les fondations d'un monde meilleur y furent jetées. Les Béatitudes prononcées sur la montagne formeront dans les hommes un coeur nouveau; c'est la loi nouvelle de l'Alliance éternelle entre Dieu et l'homme. Du sol des Béatitudes surgiront dans l'Eglise les hommes de Dieu: les justes, les martyrs, les saints. Ils sont libres de tous les mythes de puissance, de pouvoir, de richesse; ils ont soif de la vérité et faim de la justice; ils ont le ooeur pur et ils sont pacifiques; ils sont miséricordieux; à la violence ils opposent l'amour; inflexibles et forts ils témoignent de la vérité alors même qu'ils sont persécutés. Même s'ils sont écrasés par la haine injuste, rien ne peut tuer en eux l'espérance que la victoire définitive appartient à la vérité et à l'amour pour toujours. Dieu est garant de cette victoire qui ne trompe pas. "Heureux ceux qui souffrent persécution pour la justice, car le royaume des cieux est à eux!" (Mt 5,10).