Oh! quelles souffrances, chers frères et fils quelles souffrances nous viennent de ces mystérieuses vicissitudes de la vie quotidienne pleine de dangers. Celles-ci nous poussent dans les bras de Jésus, comme les premiers disciples sur le lac de Galilée: "Seigneur, sauvez- nous, nous périssons." (Matth., VIII, 25.)
Nous avons l'assurance que le Seigneur Jésus sauvera son Eglise et, à l'heure de la tristesse, Nous aimons entendre à nouveau ses paroles, même si elles nous disent avec un accent de reproche: "Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté?" (Cf. Matth., xvI, 31.) Mais Jésus aime qu'on l'invoque. Unissons-nous dans cette supplication aux fils de la toujours chère Austria fidelis, pour le prompt rétablissement de la robuste santé de leur si méritant et si ardent pasteur qui, dans son geste d'exquise fraternité, voulait se faire le noble représentant de tous les cardinaux et de tout l'épiscopat de l'Eglise catholique.
C'en est assez, ô Seigneur! C'en est assez. Per singulos dies benedicimus te, même si c'est un jour de tristesse. Fiat misericordia tua, Domine, super nos, quemadmodum speravimus in te. Amen, et semper amen.
Le correspondant de "Paris-Presse", au Vatican écrit en date du 18-2-1960 :
"Le Pape proclamera peut-être le Cardinal Stepinac "vénérable"
Vatican, 18 février - Le Cardinal Stepinac, primat de Yougoslavie, qui vient de mourir, sera peut-être proclamé "vénérable", première étape vers la béatification, qui aboutit elle-même parfois à la canonisation.
C'est le Pape Jean XXIII lui-même qui. l'a laissé entendre dans son éloge funèbre du défunt, au cours d'une Messe de Requiem célébrée en la basilique Saint-Pierre, devant vingt-huit cardinaux, de nombreux ecclésiastiques et les membres du corps diplomatique. C'est en raison de "l'admiration et de la vénération universelle" dont il a été l'objet que le prélat défunt verra sa cause introduite très prochainement au Vatican."
Allocution du Cardinal Feltin
La Messe célébrée à Notre- Dame de Paris, dimanche matin, 28 février 1960, par S. Ex. Mgr Rupp, pour le repos de l'âme du Cardinal Stepinac, a revêtu le double caractère de prière pour toute l'Eglise du silence et d'hommage à un "martyr des temps modernes" pour reprendre une expression du Cardinal Feltin. L'Archevêque de Paris et S. Em. le Cardinal Marella présidaient la nombreuse assemblée qui se pressait dans la nef. Les Croates, reconnaissables au noeud tricolore cravaté de crêpe qu'ils portaient à la boutonnière, avaient apporté un grand portrait du prisonnier de Krasic. Le Cardinal Feltin termina son discours en disant:
"In Te Domine, speravi" était la devise du Cardinal Stepinac. Elle marque la vie entière de cet intrépide prélat, prêtre de Jésus- Christ, témoin héroïque de la vérité, de la justice, de la charité, à chaque instant de sa douloureuse existence, en face de toutes les erreurs de notre temps, du nazisme au communisme. - Toute la catholicité est conviée à se recueillir et à prier pour lui. rIous ne pouvons manquer à ce devoir de fraternelle reconnaissance. Je vous invite pendant le Sacrifice de la Messe, à penser à ce héros des temps modernes, à l'exemple magnifique de courage chrétien qu'il nous laisse et à lui demander d'intervenir auprès du Seigneur en faveur de tous les fidèles qui, au- delà du rideau de fer, constituent l'Eglise du silence et qui, comme lui, sont opprimés dans l'exercice de leur foi. Qu'il intervienne enfin pour qu'entre les peuples, l'ordre et la tranquillité finissent par régner dans la justice, la loyauté et la charité!
Les cardinaux français ont adressé le le télégramme suivant au Saint-Père:
Profondément émus décès cardinal Stepinac, partageons douleur Votre Sainteté en union avec tous membres Sacré-Collège. Assurés d'interpréter pensée épiscopat français, demandons prières pour vénéré défunt et pour tous chrétiens connaissant épreuves semblables aux siennes. Prions Votre Sainteté agréer filial hommage.
ACHILLE, Card. LINART.
PIERRE-MARIE, Card.
GERLIER.
CLMENT, card.
ROQUES.
MAURICE, Card.
FELTIN.
PAUL, Card.
RICHAUD.
Allocution du Cardinal Montini
"... Que Stepinac soit notre maître, s'écriait le Cardinal Montini, en sa cathédrale de Milan. Qu'il nous enseigne l'espérance et la bonté. Il est mort entouré du silence de son Eglise à qui il reste les seules voix de la prière et du pardon. Il n'a proféré aucune invective, aucun anathème. Il n'a pas voulu abandonner son pays. Frères, fils, pardonnons et prions."