"... Le cas le plus stupéfiant est celui de l'Archevêque de Zagreb, Stepinac, Primat de l'Eglise catholique croate. L'accomplissement de ses devoirs religieux l'a contraint à avoir des relations officielles avec Pavelic, ses collaborateurs et ses représentants. Mais il n'y avait aucune preuve qu'il aidait les uns ou les autres. Il y a, au contraire, des preuves irréfutables qu'il a été constamment en conflit avec eux. Il n'y a pas de preuves qu'il encourageât le moindre geste contre les Serbes ou les Juifs mais il y a des preuves irréfutables qu'il a protégé les personnes qui étaient en danger. Il était ennemi juré du communisme et voilà la raison de sa condamnation à seize ans de prison..."

("The European Revolution", Londres, 1951, page 281.)

Georges Desbons

"Lors de la guerre de 1939, des émigrés autrichiens, tchécoslovaques, polonais affluaient en Croatie: Catholiques, Juifs, Orthodoxes, Athées. Mgr Stepinac assura l'existence de beaucoup et prit 150 enfants polonais à sa charge.

On trouve sous sa plume: a L'Eglise est la garante morale des droits fondamentaux de l'homme." "La race humaine est une. Tous les hommes sans distinction de race ou de langue ont leur origine en Dieu. Leur but est Dieu. Ils sont tous la grande famille de Dieu."

P Pendant la guerre de 1941 à 1945, il sauve de la misère et de la faim près de 14 000 enfants, sans se demander s'ils étaient catholiques, orthodoxes, juifs, croates, serbes ou tziganes. Il en entretient des centaines à ses frais personnels. Il en installe beaucoup dans son palais. Il organise les secours aux déportés, aux prisonniers et il enrôle tous les Evêques dans cette action. Il secourt en argent les familles pauvres des détenus et des déportés. Il abrite des Juifs à l'Archevêché. Il secourt matériellement les Serbes orthodoxes qui ont besoin d'aide matérielle."

(Témoignage donné en 1959.)

Demande d'intervention en faveur de deux cents orphelins juifs.

L'Archevêque de Zagreb Stepinac au Cardinal Maglione

Nr. 7/BK (A.E.S. 429/42, orig. latin.)

Zagreb, le 9 janvier 1942.

Environ deux cents enfants juifs de 7 à 17 ans, la plupart orphelins, vivent dans des conditions misérables à Zagreb à cause des lois anti-sémites. La communauté juive de Zagreb voudrait, avec la permission du Gouvernement italien, envoyer ces enfants à Florence ou en une autre ville italienne, où ils pourraient, aux frais de la communauté juive de; ce lieu-là, soit continuer leurs études, soit s'adonner; à l'agriculture.

Le soussigné a exposé toute cette affaire au Ministre d'Italie à Zagreb, qui a déclaré que cette action devait être considérée comme une action de bienfaisance plutôt que comme une action politique. Le même Ministre pense que l'intervention du SaintSiège pourrait être efficace.

Pour cette raison, je sollicite de Votre Eminence révérendissime, de bien vouloir intervenir auprès des Autorités italiennes pour que celles-ci accordent la permission ci-dessus sollicitée et cela le plus vite possible, car tout retard pourrait être dangereux.

Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la Deuxième Guerre Mondiale, tome 8. Le Saint-Siège et les victimes de la guerre, janvier 1941-décembre 1942, Librairie éditrice vaticane, 1974, page 409.

Cette intervention de Mgr Stepinac n'a pas abouti. Il reçut, en italien, la réponse suivante: "Notre bureau n'a pas manqué de signaler le cas à la personne compétente, mais celle-ci a dit savoir que les instances italiennes intéressées ne sont pas disposées à accorder la permission désirée sur le territoire du Royaume. Votre Excellence pourrait, peutêtre, prier ce Ministre d'Italie de présenter luimême et de recommander votre proposition charitable au Ministre des Affaires étrangères." (A.E.S. 555/42.)

Ce document historique et les trente- quatre autres semblables conservés dans les Archives vaticanes: "Le Saint- Siège et les victimes de la guerre, tome 9", prouvent l'inépuisable charité de Mgr Stepinac à l'endroit de tous les persécutés: Juifs ou Allemands, Slovènes, Croates, oustachis ou non, Serbes, orthodoxes ou partisans, tous ceux qui fuyaient les violences de quelque bord qu'elles viennent, des nazis, des oustachis, des partisans. Il ne voyait que des malheureux à sauver, il leur donnait asile dans sa résidence épiscopale, sa maison de campagne ou dans les maisons religieuses. Etant donné qu'il sauvait des gens si opposés entre eux, on comprend l'hostilité qu'il s'est attirée.

Nasa Rec

Le mensuel serbe de Londres, Nasa rec (Notre parole), faisant une recension du livre: "Le SaintSiège et les victimes de la guerre" (voir témoignage précédent), publie dans son numéro de décembre 1977, aussi ceci:

... "Plus loin on trouve la troisième annexe du rapport Marcone. Celui-ci aussi a été écrit par l'Archevêque Stepinac, et est daté du 31 mai 1943. On y rencontre, dans l'ordre chronologique, trente-quatre documents qui situent l'Archevêque lui- même, comme Primat de l'Eglise catholique en Croatie, dans un domaine et une intensité d'action peu connus de nous. Dans le numéro du document cité plus haut, on trouve vingt-quatre interventions-protestations en faveur des Serbes sur le territoire de l'Etat Indépendant Croate, et onze cas d'interventions en faveur des Juifs. Parmi eux, la lettre de protestation adressée à Pavelic le 14 mai 1941, est de la plus haute importance. Cette lettre proteste contre la destruction de l'église de Glina où 260 Serbes qui s'y trouvaient avaient été assassinés...

Dans tous les cas, ces documents sont très intéressants et montrent des interventions de la Hiérarchie catholique en faveur des Serbes et des Juifs dans l'Etat Indépendant Croate. Ils révèlent la personnalité très active du Cardinal Stepinac dans des circonstances données."