FRANCE - CROATIE | 3/23 |
De Louis XIII à la
Révolution
C'est au XVIIe siècle que les
Croates
introduisent en France un
élément
vestimentaire populaire entre tous, la
cravate... C'est, en effet, sous le
règne
de Louis XIII (1610-1643) que les
maréchaux Jean de Gassion (1609-
1647) et
Josias de Rantzau (1609-1650)(8) -
recrutent pour l'armée
française un
régiment de hussards croates (9)
dont
l'uniforme comprend une écharpe
blanche
qui fera fureur à la Cour de
France. Ce
régiment de cavalerie
légère recevra de
Louis XIV, en 1666, le nom de "Royal
Cravate", avant d'être dissous par
la
Révolution. Ce règne du Roi
Soleil est
d'ailleurs marqué par une
intensification
des relations avec une République
de Raguse dont les émissaires
recontrent
souvent Mazarin.
Le 6 avril 1667, un tremblement de terre
a totalement détruit la petite
République
dalmate dont les autorités
adressent à
toute l'Europe un appel de
détresse ;
Louis XIV répond le 23 juin
"à nos très
chers et bons amis, le Recteur et Conseil
de la République de Raguse", mais
toujours méfiant voire franchement
hostile aux républicains, il
n'accorde
rien, invoquant pour justifier son refus
les charges que lui impose la guerre
d'Espagne. Raguse dépêche
à Paris des
ambassadeurs de marque,
Antun Primoviæ (Primi) ou encore Stijepo
Gradiæ (Gradi), un intime de Bossuet,
mais aucun ne parvient à
fléchir le roi
de France. Ce dernier conserve la
même
prudente reserve à l'égard
de Krsto
Frankopan et Petar Zrinski, deux nobles
croates qui lui demandent son aide dans
le conflit qui les oppose à
Léopold Ier.
Les deux infortunés seigneurs sont
décapités le 30 avril 1671
à Wiener
Neustadt.
Le 12 septembre 1683, les Ottomans sont
écrasés à Vienne par
Sobieski et Jean de
Lorraine ; délivrée du
cauchemar turc,
Raguse peut se tourner vers l'Autriche,
ce qui la rend suspecte aux yeux de la
France. En 1700, toutefois, Louis XIV
encourage l'implantation commerciale
française à Raguse comme en
atteste une
lettre du gouvernement à la
Chambre de
Commerce de Marseille : "...Excitez
quelqu'un de ceux des négociants
de Marseille qui sont les plus capables
à
mettre en oeuvre ce projet et à en
profiter" (10). Sitôt dit,
sitôt fait,
les maisons Eydoux et Hercolez
s'implantent à Raguse. En 1701,
Louis XIV
répond très aimablement au
Sénat de
Raguse qui le félicite pour
l'accession
au trône d'Espagne de son petit-
fils
Philippe V. Il faut dire qu'à
Dubrovnik,
la situation politique a sensiblement
évolué avec l'apparition
d'un groupe
francophile qui réclame un
rapprochement
avec la France, et même
l'enrôlement de
matelots ragusains dans la marine
française. En 1715, lorsque meurt
Louis
XIV, les relations sont bonnes, et le
Régent Philippe d'Orléans
peut, en
réponse aux condoléances
des Ragusains,
leur écrire : "... je connoist
l'attachement de Vostre République
aux
interests de cet Etat, et je souhaite que
durant le cours de ma régence, il
se trouve des occasions de Vous marquer
l'estime que j'ay pour Vous" (8 mai 1716)
(11) -. Tout aussi affable est la lettre
que leur adresse le jeune roi Louis XV :
"... Vous devez croire aussy,
écrit-il,
que Nous serons toujours bien aise de
vous donner des marques de Notre estime
et de faire sentir à Vostre
République
les effets de Notre protection. Sur ce,
Nous prions Dieu qu'il Vous ayt,
très
chers et bien aimés, en Sa Sainte
Garde".
(12 mai 1716).
Le ministre Vergennes (1719-1787)
mène
une politique assez
généreuse à
l'égard
des Dalmates, en dépit des
nombreux
conflits commerciaux dus à
l'intransigeance du consul Le Maire, peu
apprécié des Ragusains
(12).
7. Cf. Nicolas Iorga, Voyageurs
français
dans l'Orient européen, Boivin et
Gamber, Paris 1928, p. 38.
8. Soldat émérite, le
Maréchal Comte de
Rantzau est célèbre pour
ses multiples
blessures (60). Lorsqu'il se retira du
service armé, il lui manquait un
oeil,
une oreille, un bras et une jambe.
9. Le recrutement de ce régiment
fut une
conséquence de la grosse
impression faite
par les troupes croates du comte Jean-
Louis-Hector Isolani (1580-1640) durant
la phase française de la Guerre de
Trente
Ans. Associées aux armées
de Johann von
Werth, ces troupes avaient occupé
la Picardie, investi la ville de Corbie
(1636) et causé un début de
panique à
Paris.
10. Archives de la Marine, citées
par L. de Voïnoviæ, op. cité.
11. M. Deanoviæ, op. cité, pp. 154-
155.
12. Ils obtiendront son rappel le 9
janvier 1764.
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Adriana Smajic
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